Les nouvelles du Bord


La Ciotat : le grand départ en direction des Terres Nouvelles.

"8 août 1998, La Ciotat. Enfin le départ... Après six mois d'épreuves, le Tiki Yo est enfin prêt. Bercé doucement sur mon hamac tendu entre la bastaque et le mat, je savoure la grande Bleu. L'eau glisse le long de la carène. Je revois les enfants de La Ciotat…Une semaine de mer sans vent. Le Tiki-Yo entre dans Séville le 15 août après avoir remonté le fameux Guadalqivir. Patrick, un des piliers de la préparation du Tiki Yo, arrive de France avec un nouveau pilote automatique. Il me rejoint avec son frère, Jean-Philippe, qui me suivra jusqu'au bout".

 

La traversée est mouvementée : le gasoil acheté à Séville est un mélange d'eau et de boue, ce qui nous oblige à faire une escale technique aux Canaries. Puis au Cap-Vert, pour remettre en état quelques éléments du gréement qui ont souffert pendant une tempête. L'Atlantique franchi à deux, sans expérience, c'est déjà une étape…Nous arrivons au Brésil le 2 novembre.

Nous laissons derrière nous la chaleur du Brésil, et après dix-neuf jours de mer arrivons le 14 janvier 1999 à Punta del Este, en Uruguay. Patrick nous a rejoint. Le Tiki Yo est bichonné pour affronter le grand Sud. Quittant le Rio de la Plata et ses lumières de cire, nous appareillons pour le Chili le 2 février. Dépressions aux abords des 40e rugissants, tempête dans les 50e hurlants... Le vent glacé nous pousse sur Punta Arenas que nous atteignons le 20 février.

 

 

Punta Arenas, le détroit de Magellan et les canaux de Patagonie jusqu'à Chiloë.

Notre séjour à Punta Arenas s'étant bien terminé, nous avons donc mis les voiles en direction du Détroit de Magellan qui nous conduirait directement au Canaux de Patagonie.

F equipage canaux petit.jpg (19151 octets) Le bout du Monde existe bien!! Nous l'avons rencontré et contourné sans encombre!!

Cette route est un endroit magique qui nous démontre bien l'existence d'un monde au-delà d'un autre.

 La vie y est rude même pour la végétation, humidité à 120% et froid au point de croiser quelques growlers ou icebergs de ci de là. Les hommes n'y vont pas et seules quelques espèces animales s'y rencontrent (baleines, otaries, dauphins, condors et quelques albatros et puffins) au milieu d'une végétation de bonzaïs et d'arbres dont la cime est vite érodée comme un cure-dent par les Williwaws, ces vents si violents propres à ces lieux.

R c Santa Leonor 02'.jpg (8330 octets) Tous les soirs, nous nous arrêtions dans des petites anses protégées : les caletas. La navigation de nuit est trop dangereuse en raison des obstructions et des rochers qui "traînent" au milieu des canaux, errant solitaires à fleur d'eau. Bien des bateaux ont été pris au piège, à en juger par le nombre d'épaves rencontrées.

 La navigation de jour est aussi un chose redoutable dans les canaux peu large et avec des vents de 40 à 60 nœuds (70 à 110 km/h). Ce fût beaucoup de travail et d'efforts mais nous avons appris beaucoup sur les éléments entourant la coquille de noix que nous étions... parfois!!

 Le décor fait de roches volcaniques érodées, griffées par le vent, sur lesquelles pousse une végétation submergée par l'eau coulant des cascades, motive un équipage... Magellan a du bien souvent pleurer de joie au milieu de cet endroit si hostile pour les petits hommes que nous sommes.

 Passage obligé par un glacier difficile d'accès en raison des icebergs mais sublime; la glace y craque dans un grondement de tonnerre. Puis l'arrivée au seul petit village de ces lieux, situé avant le Golf des Peines, cher à Francisco Coloane, et tellement redouté par les navigateurs!!

Puerto Eden porte bien son nom! Village de 180 pêcheurs où vivent les derniers indiens Alacaloufs. Il n'y a rien là bas : ni téléphone, ni véhicules, ni eau chaude, ni eau courante et seulement de l'électricité de 18h à 00h!! Mais les gens sont charmants et les enfants courent de l'école pour venir en barque voir notre bateau. Nous avons été invités à déguster les "spécialités locales" chez des indiens... Fameux (à base de fruits de mer et d'algues).

R nb eglise chiloe'.jpg (5438 octets)Finalement, passés après une dépression nous a permis de traverser le Golfo des Peñas et d'arriver sur l'île de Chiloë le 27 avril 1999 avec la protection d'un anticyclone, chose rare dans ces contrées lointaines.

 Un petit tour sur l'île où poussent plus de 200 églises en bois et où règne un mysticisme très proche de la sorcellerie avant de repartir pour l'île de Pâques et ses statues gigantesques.

 

 

Du continent des Anciennes Amériques à la Polynésie. JP moai petit.jpg (11108 octets)

Quittons Puerto Montt et les terres des Amériques pour nous diriger sur l'île de Pâques, mystique et mythique, chère à notre ami Alfred Métraux. Anthropologue de renom, il étudia la vie et les moeurs de Rapa Nui, relatant les légendes des ahus et le culte de l'homme oiseau.

L'étrave du Tiki Yo fend allègrement la houle lorsque la drisse de grand-voile cède. François monte en haut du mat, une secousse le fait lâcher prise.Il entame quatre circonvolutions autour des haubans et finit sa course en le heurtant violemment avec sa tête. Résultat : côte fêlée et points de sutures au menu.

Cela ne nous empêche pas d'arriver le 12 juin devant l'île aux moaïs. Magie d'une île aux grandes plaines ondulées où l'ombre des sculptures rappellent les nombreuses guerres entre les longues oreilles et les petites oreilles qui finissaient par de doux banquets cannibales. La côte déchiquetée, un vent qui tourne sans cesse, restent le cauchemar des voiliers qui perdent souvent leur ancre et se retrouvent drossés contre les récifs... Il faut toujours deux personnes présentent à bord.

Après une semaine de promenade dans ces terres ancestrales, nous hissons l'ancre et nous partons vers l'île la plus australe de la Polynésie Française : Rapa.

La niña a beau nous envoyer des vents violents qui changent souvent de direction, nous atteignons enfin l'île qui apparaît sous un ciel violacé, tel un dragon couché. Un chenal en zigzag conduit dans un cirque aux hauts pics échancrés.C'est l'envers de la carte postale Polynésienne : pas de cocotiers, pas de sable blanc, pas de vahinés... Mais les fêtes du 14 juillet qui durent... trois semaines! Le Heiva, danses, chants et jeux divers au programme des féstivités.

Les ateliers photos, malgré la pluie et le vent violent se sont très bien déroulés. Grosse frayeur pour le bateau, 65 noeuds de vent dans la baie avec une houle de un mètres. Le Tiki Yo rompt quatre aussières pendant la nuit, mais l'équipage veillé...

Nous laissons cette île brassée par les éléments et nous rejoignons Tahiti le 8 août, date anniversaire de notre départ, pour y effectuer quelques réparations et nous y reposer.

Petit détour par les îles sous le Vent, Bora Bora, Moorea, Tahaa... Beauté des lagons, plages de sable blanc, eau turquoise et cocotiers au rendez-vous. Petit paradis de tranquilité et gentillesse polynésienne.

Le Tiki Yo franchit les lames, laissant derrière lui Tahiti. Escale technique où nous avons réparé les dégâts survenus à Rapa. La croix du Sud s'incline doucement et nous montre le passage vers les Samoa, que nous atteignons après onze jours de navigation. La traversée vers Nauru est laborieuse, Eole est paresseux sous ces latitudes... Des grains violents apparaissent et déchirent notre grand-voile: trente heures de couture non-stop dans une mer agitée…

L'Asie, le chemin du retour.

Trente-trois jours de mer dans une chaleur suffocante. Le 18 décembre 1999, le Tiki Yo pointe son étrave au lever du jour devant l'île d'Hommonhon. Première terre touchée par Magellan. Cet îlot nous indique l'entrée de Surigao Channel qui nous conduit à Cebu, deuxième ville des Philippines.

17 février 2000. Un des moments les plus haïssables du voyage: les adieux... Nous laissons derrière nous un tas d'amis. Le Tiki Yo gonfle ses voiles et évite les nombreux cargos du détroit de Malacca, déjoue les pirates, échappe aux tempêtes, avale les 3500 miles qui le séparent du Sri Lanka. Nous arrivons le 27 mars 2000 à Colombo.

Descente vers le sud de l'océan Indien, poussés par les alizés musclés du Sud-Est. Le Tiki Yo effleure Maurice et, par petites étapes, franchit le cap de Bonne Espérance et ses vagues monstrueuses. Repos sur le beau rocher de Sainte-Hélène. Nous quittons avec regret la croix du Sud pour entrer dans l'hémisphère nord. Le pot au noir franchi une dernière fois, le Cap-Vert nous ouvre les bras le 8 octobre 2000 : la terre est bien ronde!

 

Peine et joie, calme et tempêtes se sont succédés. Vingt-six mois de navigation, trente-six mille miles parcourus. Une longue chaîne photographique fait la farandole grâce aux regards des enfants. Le Tiki Yo peut rentrer à son port d'attache.

 

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